Le ciné-spectacle Beetlejuice – le 1er novembre à Nancy : compte-rendu


Il y a des projets comme ça qui font plaisir. Surtout lorsqu’ils ont lieu lors de la saison d’Halloween, période de toutes les folies et où le macabre et l’humour se mélangent toujours si bien. Ce que Tim Burton avait bien compris en pondant en 1988 son film culte Beetlejuice et son personnage éponyme de fantôme fou et vulgaire, interprété par un Michael Keaton déjanté.

Et c’est en ce 1er Novembre 2012 que l’association Nancéenne Proj(ect), qui rassemblent un paquet de cinéphiles convaincus (et fous), lance la projection du film sous la forme d’un spectacle vivant, à la façon d’un Rocky Horror Picture Show. Pour ceux qui n’en connaissent pas le principe, il s’agit de faire participer le public à la projection du film, de façon interactive. Ainsi, à l’entrée du petit théâtre Mon Désert de la ville de Nancy, remplie à ras bord, nous sont remis à chacun (et par une comédienne grimée en Miss Argentina, la fonctionnaire aux cheveux rouges et à la peau verdâtre de l’Au-delà du film)  un petit sac plastique contenant divers accessoires dont nous devrons nous servir sous indications d’hôtesses, de rouge vêtues, durant la projection.

Contenu du sac : Une araignée en plastique, un sachet de semoule crue, un autre rempli de confettis brillants, un flacon en plastique contenant du gros sel et une étrange languette de carton pliée en deux avec deux capsules de bières collées dessus et dessous (voire photo ci-dessous).Les fans du film de Burton n’ont alors qu’à lancer des spéculations sur quelle scène nécessitera tel accessoire.

Mais, la petite salle contient également, en plus d’un souffleur de fumée et d’un éclairage d’ambiance à diverses couleurs,  un rideau, qui s’ouvrira à loisir pour permettre aux comédiens de l’association de surgir lors des scènes les plus emblématiques afin de la reproduire en live et d’interagir avec le public.

Si la petite vie des Maitlands ne prête pas à beaucoup d’interaction, on profitera de la première et marquante image de l’araignée sur la maison de la maquette d’Adam (Alec Baldwin) pour commencer les hostilités en envoyant nos petites araignées en plastique sur le public et sur la scène, où les charmantes hôtesses, éclairées par un projecteur, nous indique par avance quel accessoire utiliser.

Et c’est dès la plongée des Maitlands dans le lac à bord de leur voiture, que le rideau s’ouvre une première fois, dévoilant un chien en peluche retenant une voiture en plastique sur une planche de bois. La peluche est retirée manu militari depuis les coulisses ce qui a pour effet de faire chuter la voiture au même moment que dans le film ! Déjà une parfaite mise en bouche de la future heure et demie qui nous attends.

L’effet accessoire deviendra davantage probant avec la présence du manuel pour personnes décédées, bien en évidence sur un présentoir à droite de la scène et éclairé par un projecteur dès que les Maitlands le trouve.

La première et mystérieuse apparition de Beetlejuice, dos à la caméra, et là dos au public, lisant le journal est assez amusante et crée une vraie attente quant à l’envie de voir l’acteur dans son entier jouer le personnage.

Le show commence à s’intensifier avec l’arrivée des Deetz : Otto et Délia surgissent sur scène par le rideau, descendent dans la salle en aspergent allégrement les premiers rangs de bombes à serpentins, le rideau s’ouvre pour laisser voir Barbara et Adam tentant de leur faire peur avec la tête coupée de ce dernier, le rideau se referme pour se rouvrir quasiment aussitôt pour laisser apercevoir Adam sans tête courant de part et d’autre de la scène. Enfin, l’apothéose de cette séquence se conclut avec une arrivée des hôtesses à perruques et robes rouges, nous signalant que la semoule va devoir être lancé au moment même où Barbara échoue dans le désert avec le serpent de sable. Une véritable bataille de semoule s’engage dans la salle, les rangs les plus hauts remportent la bataille la dragée haute, pouvant visé qui ils souhaitent, certains allant jusqu’à réclamer des merguez pour aller avec. Et pour le serpent de sable ? Qu’à cela ne tienne, on nous en envoie un gigantesque cousu main à faire circuler dans le public comme dans un véritable slam.

Le temps d’apprécier le film quelques minutes, et l’équipe remets gentiment le couvert, en lançant une première vague de fumée en même temps que les vapeurs employées pour virer le papier peint. Les premiers rangs toussent un peu, mais l’effet est bien là. On s’attendrait presque à un branle-bas quand la cuisine est dévastée par une de sculpture de Delia. En lieu et place, c’est le spot télé de Beetlejuice qui débarque sur la scène, la gestuelle quasi similaire du comédien est absolument géniale, danse et auto-exorcisme compris.

Les costumes sont tous très proches et chaque scène jouée à la seconde près par les comédiens. L’arrivée d’Adam et Barbara dans l’au-delà est l’occasion d’éclairer la salle de vert , de bleu (dans le couloir en carreaux) et de faire défiler par-dessus le rideau un faux cadavre écrasé fait de bric et de broc. Effet garanti. De même, lorsque Juno (Sylvia Sydney) fume par le larynx, soyez sûrs que le public se reprend une vague de fumée, pour faire bonne mesure. Un petit aparté avec nos hôtesses pour la scène de la mouche mangée par Beetlejuice : le public se verra bombardé de barres de chocolat, de quoi refaire le plein de sucre après le premier tiers du film.

Impossible de faire l’impasse sur les fantômes en draps, de même que les photos que Lydia en prends (des acteurs surgissent de chaque côté de la scène pour copieusement les shooté au polaroïd).

Une des séquences, les plus cultes et réussies de la soirée restera sans conteste la rencontre entre les Maitlands et Beetlejuice. Les deux comédiens repoussent un paquet de morceaux de cartons d’un cercueil improvisé, à la lumière d’une enseigne éclairée au nom de « Beetlegeuse ». Ce dernier surgit du cercueil tremblant, saupoudré de poussière, avant d’emballer proprement Barbara.

Mais le top reste la danse calypso, où toute la tablée est reconstituée sur scène avec la chorégraphie reprise au geste près par chacun des acteurs. Le public est enthousiaste, bat le rythme et applaudit une fois les visages enfoncés dans les assiettes.

Les hôtesses réapparaissent pour que nous agitions nos petits flacons de sel afin d’incarner la sonnette du serpent Beetlejuice. C’était bien l’un des accessoire les plus surprenant, car difficile à déduire. En revanche, une autre chose que nous n’avons pas forcément vue venir, est la séquence du bordel, qui rassemble un Beetlejuice recouvert de piquants et les hôtesses de la soirée. Un beau chapelet de sifflets masculins accompagnent la petite scénette.

Soudain surgit de nulle part lors de la scène de charade entre Beetlejuice et Lydia, un…pénis géant (le mot en « B », hein) pour un jeu rébus bien senti (voire vidéo) qui en fera rire plus d’un.

Le rythme se ralentit un peu le temps de la dernière ligne droite : l’exorcisme des Maitlands, reconstitué en temps réel devant le public. Grâce à un bon éclairage et des masques, l’effet est très convaincant. Mais pas autant que l’arrivée de Beetlejuice hors de la maquette, avec un costume incroyable, des bras extensibles terminés par des ballons et un chapeau-manège. De quoi éveiller à nouveau l’enthousiasme de la salle, qui, sous ordre, fera claquer ces maracas improvisées sur le rythme du dentier d’Adam, et non pas sur la séquence de fin comme je l’aurais initialement cru.

Et c’est sur la séquence finale avec Henry Belafonte que l’on termine cette mémorable soirée. Une comédienne dans le rythme, habillée en Lydia, danse en solo sur scène avant d’être rejointe par toute la troupe sur le générique de fin. Et les confettis alors ? Et bien, nous les lançons partout dans la salle au moment où Beetlejuice se fait réduire la tête par de la poudre de perlimpinpin de l’au-delà. De quoi nous épouiller pendant plusieurs jours (c’est du vécu).

Enfin, la troupe entière vient saluer en costumes la salle conquise après cette vision si particulière de ce film au fun intemporel que certains ont découvert pour la première fois ce soir. Difficile de se concentrer uniquement sur le film, tant l’envie d’être au taquet sur les prestations live est tentante.

Tim-Burton.net y était et valide le procédé de Proj(ect) !

Et vous, ça vous dirait de voir ça ? À quand une autre ?

Site officiel de l’association Proj(ect) : http://projectfestival.fr/

Compte-rendu, photos et vidéos par Arnold.

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